Comment le droit protège-t-il la qualité de l’air ?
PDFSi le problème de la pollution atmosphérique est ancien (Focus #1), il n’en est pas moins très contemporain du fait de la prise de conscience de ses impacts tant environnementaux que sanitaires. En France, la gestion de la qualité de l’air ambiant repose sur des normes de qualité de l’air dont la surveillance est assurée par un réseau comptant aujourd’hui près de 650 stations de mesure. Aux différentes normes de qualité de l’air sont associés des dispositifs qui sont soit des procédures d’urgence destinées à rétablir rapidement des concentrations en polluants compatibles avec la santé publique, soit des mesures de police visant à réduire la pollution chronique.
1. Pourquoi faut-il protéger la qualité de l’air ?
« Constitue une pollution atmosphérique l’introduction par l’homme, directement ou indirectement, ou la présence dans l’atmosphère et les espaces clos, d’agents chimiques, biologiques ou physiques ayant des conséquences préjudiciables de nature à mettre en danger la santé humaine, à nuire aux ressources biologiques et aux écosystèmes, à influer sur les changements climatiques, à détériorer les biens matériels, à provoquer des nuisances olfactives excessives » [1].
Les polluants réglementés sont très divers : dioxyde de soufre (SO2), oxydes d’azote (NOx), ozone (O3) troposphérique, monoxyde de carbone (CO), composés organiques volatils et hydrocarbures (benzène et benzo(a)pyrène), métaux lourds (plomb, arsenic, cadmium, nickel) et particules fines (particules en suspension de granulométrie inférieure à 10 micromètres : PM10 et à 2,5 micromètres : PM2,5) (figure 1) [2].
La réglementation et la surveillance de ces polluants sont imposées par le droit de l’Union européenne qui régit la matière (Focus # 2).
1.1. La pollution de l’air endommage l’environnement
Les oxydes de soufre et d’azote qui, en présence d’humidité, se transforment en acides sulfurique (H2SO4) et nitrique (HNO2), ont provoqué l’acidification d’un grand nombre de lacs. De nombreux polluants atmosphériques (SO2, NOx, O3, fluor…) sont phytotoxiques et peuvent, même à de faibles concentrations, provoquer des nécroses foliaires, perturber la photosynthèse et inhiber la croissance des plantes en cas d’exposition prolongée. Les substances acides agissent également par l’intermédiaire du sol. Elles lessivent les éléments nutritifs du sol conduisant ainsi à une carence des plantes en calcium et magnésium et provoquent la libération de composés (aluminium et manganèse) toxiques.
Les composés azotés contribuent également à l’eutrophisation des sols. Principal élément nutritif des végétaux, l’azote, reçu en excès par dépôts d’origine atmosphérique, génère un déséquilibre nutritionnel, gravement dommageable pour les écosystèmes sensibles tels que les forêts, les marais, les prairies (figure 2).
Les oxydes d’azote provoquent de plus, avec les composés organiques volatils (COV), la formation d’ozone (O3). Or ce même gaz qui, dans la stratosphère, protège la Terre des rayons ultraviolets du soleil, est, dans la troposphère, un puissant oxydant photochimique qui participe de plus au renforcement de l’effet de serre. L’ozone est par ailleurs très phytotoxique, il perturbe la photosynthèse et inhibe la croissance des plantes en cas d’exposition prolongée (figure 3).
Ces différents effets de la pollution atmosphérique ne sont pas seulement sensibles au plan local mais aussi à l’échelle nationale, continentale et même planétaire (Focus # 3). Les polluants franchissent en effet les frontières étatiques et se déplacent au gré des vents sur des centaines voire des milliers de kilomètres. La spécificité de l’atmosphère apparaît ici en pleine lumière. Il s’agit en effet de l’élément le plus mobile de la planète, constituant par nature un milieu de transit des substances émises dans l’air qui, vouées à retomber sur terre, finiront par contaminer la biosphère en polluant l’eau et le sol. L’atmosphère détient ainsi une capacité d’auto-épuration ; un certain nombre de substances en disparaissent par lessivage (précipitations) ou dépôts secs ou sont rapidement détruites par divers processus ou réactions (dissociation photolytique, inactivation, élimination chimique).
1.2. La pollution de l’air nuit gravement à la santé
Si la dimension sanitaire ne résume certes pas les enjeux de la lutte contre la pollution atmosphérique, la santé a pourtant une nette préséance. En atteste la reconnaissance du droit de chacun à respirer un air qui ne nuise pas à sa santé [3]. Dans le même ordre d’idées, la définition de la pollution de l’air intègre les agents biologiques, ce qui vise entre autres les pollens, éléments parfaitement naturels qui ne sont considérés comme polluants qu’en raison de leur effet allergène pour l’homme. La pollution de l’air s’applique enfin aux espaces clos (habitations, moyens de transports, bâtiments publics…) dans une optique ici aussi strictement sanitaire liée à la présence de polluants naturels (radon…) ou non (monoxyde de carbone, aldéhydes…) potentiellement très dangereux pour la santé humaine.
La préséance sanitaire tient aussi à un constat : la pollution atmosphérique provoque la mortalité prématurée de milliers et même, à l’échelle mondiale, de millions d’individus [4], et une augmentation de la fréquence de certaines pathologies (surmorbidité), dont l’asthme.
En France, le nombre de décès anticipés attribuables à la pollution atmosphérique serait, selon Santé Publique France (ex. Institut national de veille sanitaire), de l’ordre de 48 000 par an pour les seules particules fines [5]. L’Agence européenne de l’environnement a produit des chiffres de cet ordre de grandeur : 45 120 décès prématurés pour les PM2,5 ; 8 230 pour le dioxyde d’azote ; 1 780 pour l’ozone [6].
À long terme, l’exposition à des niveaux de pollution couramment observés en environnements urbain et péri-urbain, semble induire des cancers et se traduire par un excès de mortalité et une diminution de l’espérance de vie de plusieurs mois à plusieurs années [7]. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) a classé en groupe 1 (« cancérogène certain pour l’homme ») les gaz d’échappement des moteurs en juin 2012 puis, en 2013, la pollution atmosphérique et les particules. Par ailleurs, certains types d’hydrocarbures (benzène, hydrocarbures aromatiques polycycliques, aldéhydes…), de particules (comme celles émises par les moteurs diesel) ou de polluants organiques persistants (dioxines, DDT, PCB…) peuvent provoquer, même à faibles doses, des troubles de gravité diverse, allant de la gêne respiratoire ou oculaire aux leucémies et autres cancers, en passant par des altérations du système nerveux, hormonal ou immunitaire et du patrimoine génétique.
2. Comment la qualité de l’air ambiant est-elle gérée ?
La gestion de la qualité de l’air (immission) s’adresse à la qualité du milieu ; elle doit être distinguée du contrôle des émissions (qu’elles soient automobiles, industrielles, agricoles, ou autres) même si les deux aspects sont évidents liés, la réglementation des sources d’émission étant nécessaire pour atteindre les normes de qualité.
2.1. Les normes de qualité de l’air
Ces normes sont fixées, après avis de l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES), « en conformité avec celles définies par l’Union européenne et, le cas échéant, par l’Organisation mondiale de la santé. Ces normes sont régulièrement réévaluées pour prendre en compte les résultats des études médicales et épidémiologiques » [8].
Deux catégories de normes s’adressent aux épisodes ou pics de pollution : le seuil d’alerte et le seuil d’information et de recommandation.
Le seuil d’alerte correspond à un « niveau au-delà duquel une exposition de courte durée présente un risque pour la santé de l’ensemble de la population ou de dégradation de l’environnement, justifiant l’intervention de mesures d’urgence » [9].
Le seuil d’alerte est celui dont le dépassement peut provoquer à court terme des effets néfastes pour la santé de quiconque y est exposé, d’où la situation d’urgence à laquelle les autorités publiques doivent réagir au moyen de mesures qui s’imposent à leurs destinataires (par ex. la circulation alternée).
Des seuils d’alerte ont été fixés pour le dioxyde de soufre (SO2), les oxydes d’azote (NOx), l’ozone (O3) et les particules en suspension de granulométrie inférieure à 10 micromètres (PM10) (figure 4), les autres polluants réglementés ne pouvant atteindre des concentrations suffisantes dans l’air ambiant pour présenter un risque sanitaire à court terme.
Le seuil d’information et de recommandation correspond à un niveau au-delà duquel « une exposition de courte durée présente un risque pour la santé humaine de groupes particulièrement sensibles au sein de la population et qui rend nécessaires l’émission d’informations immédiates et adéquates à destination de ces groupes et des recommandations pour réduire certaines émissions » [10].
En effet, au sein de la population générale, on distingue des catégories plus fragiles, composées des personnes vulnérables (femmes enceintes, nourrissons et jeunes enfants, personnes de plus de 65 ans, personnes souffrant de pathologies cardiovasculaires, insuffisants cardiaques ou respiratoires, personnes asthmatiques) et des personnes sensibles, c’est-à-dire dont les symptômes apparaissent ou sont amplifiés lors des pics (par ex. personnes diabétiques, immunodéprimées, souffrant d’affections neurologiques ou à risque cardiaque, respiratoire, infectieux).
De tels seui
ls ont été fixés pour le dioxyde d’azote, le dioxyde de soufre, l’ozone et les PM10 (figure 4).
Lors de l’épisode de pollution particulaire qui a affecté l’Île-de-France en décembre 2016, qui fut le plus intense de ces dix derniers hivers, les concentrations de PM10 enregistrées étaient de 259 µg/m3 (www.airparif.asso.fr/actualite/detail/id/187).
Deux catégories de normes s’adressent à la pollution chronique : la valeur limite et la valeur cible.
La valeur limite est « un niveau à atteindre dans un délai donné et à ne pas dépasser [11], et fixé sur la base des connaissances scientifiques afin d’éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs sur la santé humaine ou sur l’environnement dans son ensemble » [12].
Elle représente la qualité que l’air doit revêtir sur une période donnée (heure, journée, année) variable selon le polluant considéré. Des valeurs ont été fixées pour les oxydes de soufre et d’azote, les particules (PM10 et PM2,5), le plomb, le benzène et le monoxyde de carbone.
La valeur cible est « un niveau à atteindre, dans la mesure du possible, dans un délai donné, et fixé afin d’éviter, de prévenir ou de réduire les effets nocifs sur la santé humaine ou l’environnement dans son ensemble » [13].
Tandis que la valeur limite impose une obligation de résultat, la valeur cible n’implique qu’une obligation de moyens, l’État s’engageant à prendre « toutes les mesures nécessaires n’entraînant pas des coûts disproportionnés » [14] afin que les concentrations dans l’air ambiant de ces polluants ne dépassent pas les valeurs cibles (figure 5).
Des valeurs cibles ont été fixées pour l’ozone, certains métaux lourds (l’arsenic, le cadmium, le nickel), le benzo(a)pyrène (traceur des hydrocarbures aromatiques polycycliques – composés organiques volatils) et jusqu’en 2015, pour les PM2,5.
L’objectif de qualité de l’air (OQA) est « un niveau à atteindre à long terme et à maintenir, sauf lorsque cela n’est pas réalisable par des mesures proportionnées, afin d’assurer une protection efficace de la santé humaine et de l’environnement dans son ensemble » [15]. Des OQA ont été fixés pour les oxydes de soufre et d’azote, les particules (PM10 et PM2,5), le plomb, le benzène et l’ozone (figure 6).
2.2. Qui surveille la qualité de l’air et comment ?
La surveillance de la qualité de l’air est assurée par des organismes constitués sous forme d’associations de la loi de 1901 et agréés par le ministre de l’Environnement. Les associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA) sont régionalisées depuis 2012 (figure 7).
Les AASQA sont chargées de diverses missions et notamment :
- la surveillance des polluants réglementés (figure 8, figure 9) ;
- la prévision de la qualité de l’air pour les polluants qui font l’objet de procédures de gestion des épisodes de pollution ;
- l’information du public, via notamment les indices de qualité de l’air qu’elles calculent et diffusent (figure 10, figure 11) ;
- alerter l’autorité de police en cas de pics de pollution et diffuser les informations et recommandations tout au long de l’épisode de pollution.
Le calcul et la diffusion de l’indice ATMO est obligatoire dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants. Calculé pour une journée, l’indice ATMO est un nombre entier compris entre 1 et 10 auquel est associé un code couleur. L’indice ATMO est égal au plus grand des quatre sous-indices calculés pour le dioxyde de soufre, le dioxyde d’azote, l’ozone et les particules (figure 10).
L’indice est figuré par une représentation aisément compréhensible par tout public (figure 11).
3. Comment protège-t-on concrètement la qualité de l’air ?
3.1. Les alertes
Le dépassement des seuils d’information et de recommandation déclenche des actions d’information du public ainsi que la diffusion de recommandations sanitaires et de recommandations visant à limiter les émissions des polluants atmosphériques concernés ou de leurs précurseurs (compétence du préfet en concertation avec l’Agence régionale de santé – ARS, les maires, les établissements de santé et établissements médico-sociaux). Enfin, sont diffusées des recommandations visant à réduire les émissions : covoiturage, utilisation de transports en commun, réduction des déplacements automobiles non indispensables des entreprises et des administrations, adaptation des horaires de travail, télétravail, utilisation des parkings-relais…
Toutefois, pour les particules PM10 et l’ozone, lorsqu’un dépassement du seuil d’information et de recommandation est mesuré durant deux jours consécutifs ou lorsqu’un dépassement du seuil d’information et de recommandation est prévu pour le jour même et le lendemain par modélisation (« épisode de pollution persistant »), on bascule automatiquement d’une procédure d’information-recommandation, ne générant que des mesures facultatives, à une procédure d’alerte, impliquant des mesures d’urgence obligatoires.
Le dépassement ou le risque de dépassement d’un seuil d’alerte, modélisé ou constaté par un OASQA ou l’existence d’un épisode de pollution persistant (PM10 et ozone), déclenchent la procédure d’urgence.
La procédure d’alerte impose au préfet d’en informer la population et de prendre des mesures d’urgence visant à limiter l’ampleur et les effets de la pointe de pollution sur la population. Ces mesures sont précisées par arrêté préfectoral ou interpréfectoral. Elles doivent être adaptées à la nature et à l’ampleur de l’épisode de pollution ainsi qu’aux particularités locales.
Les mesures d’information sont diffusées dans les mêmes conditions qu’en cas de procédure d’information-recommandation auprès des personnes sensibles ou vulnérables et des institutions les plus concernées (écoles, crèches, hôpitaux et institutions pour personnes âgées).
Les mesures réglementaires comportent des restrictions voire une suspension des activités concourant à la pointe de pollution, y compris le cas échéant de la circulation des véhicules.
Ces mesures incluent au moins les actions listées en annexe d’un arrêté ministériel [16], pour chaque grand secteur émetteur : agriculture (interdiction des épandages azotés, de l’écobuage ou du brûlage à l’air libre…), industrie (report de certaines opérations émettrices, utilisation de combustibles à basse teneur en soufre…), résidentiel (report des travaux d’entretien ou de nettoyage avec des outils non électriques ou des produits à base de solvants organiques, suspension de l’utilisation d’appareils de combustion de biomasse non performants ou de groupes électrogènes), transports (automobile, aérien…) [17]. Les mesures de restriction s’adressent ainsi à un vaste panel d’émetteurs. Pourtant, ce sont indéniablement celles applicables à la circulation automobile qui sont les plus médiatisées, sans doute parce qu’elles s’adressent au plus large public.
Les restrictions à la circulation comprennent la limitation voire le détournement du trafic routier des poids lourds en transit, la réduction de la vitesse maximale autorisée (figure 12), ou encore la circulation alternée et/ou différenciée.
La circulation alternée repose sur le numéro de la plaque d’immatriculation des véhicules. Le Conseil d’Etat, estimant que le critère du numéro minéralogique est « aisément applicable aux usagers et contrôlable par les agents chargés du contrôle », a considéré que le dispositif de circulation alternée « présente un caractère d’intérêt général et permet de réagir dans les meilleurs délais aux pointes de pollution selon un critère objectif » [18]. Si le critère du numéro minéralogique n’est pas arbitraire, il n’en demeure pas moins dénué de justification environnementale.
La circulation différenciée repose sur le niveau d’émission de polluants des véhicules. Une nomenclature des véhicules classés en fonction de leur niveau d’émission de polluants a été adoptée en juin 2016 [19] qui a été utilisée pour la mise en œuvre des certificats « qualité de l’air » (CQA) dénommés Crit’air.
Il existe 6 classes assorties d’un code couleur, en fonction de la motorisation (essence, diesel, gaz, hybride rechargeable), du type de véhicules (deux-roues, trois-roues et quadricycles ; véhicules particuliers ; véhicules utilitaires légers; poids lourds, bus et autocars) et de la date de première immatriculation (ou de la Norme Euro). Une classe spécifique est réservée aux véhicules « zéro émission moteur» (100% électrique et hydrogène) de chaque catégorie pour lesquels le CQA est vert. Les véhicules de chaque catégorie les plus polluants (les plus anciens) sont non classés.
Le conducteur contrevenant aux mesures de restriction de la circulation s’expose à une amende de 22 à 35 € et à l’immobilisation de son véhicule.
3.2. Le plan de protection de l’atmosphère
Un plan de protection de l’atmosphère (PPA) doit obligatoirement être élaboré (par le préfet) dans toutes les agglomérations de plus de 250 000 habitants. Par ailleurs, un PPA doit être élaboré dans les zones où un dépassement des valeurs limites ou des valeurs cibles a été constaté ou risque de l’être. Dans ce dernier cas, le PPA doit être élaboré dans les dix-huit mois suivant le constat du dépassement [20].
Le recours au PPA peut être évité si des mesures prises dans un autre cadre permettent de réduire les niveaux de concentration de manière plus efficace. Le préfet doit alors élaborer et mettre à la disposition du public un document simplifié d’information précisant notamment les mesures prises et leur effet attendu, et veiller au suivi annuel de celles-ci.
Le PPA vise essentiellement à parvenir à respecter les valeurs limites et les valeurs cibles. À cet effet, il établit la liste des mesures préventives et correctives, temporaires ou permanentes, pouvant être prises par les autorités de police compétentes à l’intérieur d’un périmètre délimité par le plan, par exemple des normes d’émission plus strictes pour certaines catégories d’émetteurs ou la réduction permanente des vitesses maximales autorisées [21].
3.3. Les zones à circulation restreinte
La loi relative à la transition énergétique pour une croissance verte a institué les « zones à circulation restreinte » (ZCR) dans le but de « lutter contre la pollution atmosphérique » [22].
Les zones à circulation restreinte ne peuvent être créées que dans les agglomérations et les zones couvertes par un PPA. L’arrêté créant la ZCR précise les catégories de véhicules concernées et fixe les mesures de restrictions de circulation applicables en fonction de leur classement (matérialisé par la couleur de la vignette Crit’air). L’accès à la zone ne peut être interdit à certains véhicules quel que soit leur classement (notamment police, gendarmerie, douanes, incendie, médecins…). Par ailleurs, des dérogations peuvent être accordées, sur demande motivée des intéressés, par l’autorité de police de la circulation.
A Paris, la circulation des poids lourds et autocars immatriculés avant le 1er octobre 2001 (ne répondant pas aux critères d’obtention de la vignette Crit’Air) est interdite depuis le 1er septembre 2015 tous les jours de 8 h à 20 h, y compris le week-end. Les véhicules non classés (véhicules particuliers et utilitaires légers diesel ou essence mis en service avant le 1er janvier 1997 ainsi que les deux roues) ne peuvent plus circuler les jours ouvrés de 8 h à 20 h [23].
Le fait pour un conducteur de contrevenir aux restrictions d’une ZCR est puni d’une amende de 90 € pour un véhicule lourd et de 45 € pour un véhicule de tourisme, une camionnette ou un véhicule à moteur à deux ou trois roues. Est puni des mêmes amendes, le fait, pour ces mêmes véhicules, de stationner dans le périmètre de la zone lorsque le véhicule n’est pas identifié ou lorsque l’accès de ce véhicule à la ZCR est interdit à tout instant sans discontinuer. Ces infractions peuvent également entraîner l’immobilisation du véhicule [24].
4. Comment s’informer sur la qualité de l’air ?
Les AASQA constituent un relais majeur de l’information puisqu’elles sont chargées par les textes [25] :
- d’informer le public quotidiennement sur la qualité de l’air (observée et prévisible) ;
- de relayer les informations et recommandations lors des épisodes de pollution ;
- de diffuser gratuitement et librement, sur leurs sites Internet :
- des cartes annuelles descriptives des situations de dépassement pour l’ozone, le dioxyde d’azote et les particules (PM2,5 et PM10) ;
- le bilan régional annuel des résultats de la surveillance de la qualité de l’air ;
- l’inventaire régional spatialisé des émissions primaires des polluants atmosphériques réglementés et de leurs précurseurs ;
- les résultats de la surveillance des polluants réglementés et leurs prévisions mises à jour ;
- les indices de qualité de l’air (figure 13, figure 14, figure 15).
Par ailleurs, le consortium PREV’AIR (figure 16), par l’intermédiaire de ses membres [26], élabore quotidiennement et met à disposition, librement et gratuitement, sur le site Internet www.prevair.org :
- des cartes de prévisions des concentrations de particules (PM10 et PM2,5), d’ozone et de dioxyde d’azote, pour le jour même, le lendemain et le surlendemain ;
- des cartes de modélisation des concentrations de ces mêmes polluants pour la veille, en intégrant les données des observations des AASQA ;
- des liens vers le site Internet des AASQA pour accéder aux données produites par elles et à leurs prévisions à l’échelle régionale.
L’information en matière de qualité de l’air est sans doute l’une des plus développées de tout le droit de l’environnement à la mesure sans doute des inquiétudes que suscite la pollution atmosphérique et de la responsabilité de chacun en ce domaine. La sensibilisation n’est pas la moindre vertu de cette information, car si chacun est pollué, chacun est également pollueur. Sans cette prise de conscience, le droit demeurera impuissant à juguler le phénomène.
Références et notes
Image de couverture. Domaine public.
[1] Code de l’environnement, article L. 220-2.
[2] Code de l’environnement, article R. 221-1.
[3] Code de l’environnement, article L. 220-1.
[4] D’après l’OCDE, la pollution de l’air extérieur serait à l’origine de 3 millions de décès prématurés dans le monde en 2010. La pollution atmosphérique urbaine serait même appelée à devenir la première cause de mortalité dans le monde d’ici 2050. Selon les projections, ce chiffre pourrait atteindre 6 à 9 millions en 2060 (selon que l’on utilise une fonction concentration-réponse linéaire ou non linéaire) (OCDE (2016). Les conséquences économiques de la pollution de l’air extérieur, OCDE, Paris).
[5] Santé publique France. (2016). Impacts sanitaires de la pollution de l’air en France : nouvelles données et perspectives : http://www.santepubliquefrance.fr/content/download/1003/9952/version/2/file/CP_pollution_atmospherique_210616.pdf.
[6] European Environment Agency, Air quality in Europe, 2016, p. 60 : https://www.eea.europa.eu/publications/air-quality-in-europe-2016/at_download/file.
[7] Voir https://www.airparif.asso.fr/pollution/effets-de-la-pollution-generalites.
[8] Code de l’environnement, article L. 221-1.
[9] Code de l’environnement, article R. 221-1, I, 11°.
[10] Code de l’environnement, article R. 221-1, I, 10°.
[11] En tout cas à ne pas dépasser plus du nombre de fois autorisé par les textes. Ainsi, la valeur limite pour les PM10 qui est de 50 µg/ m³ en moyenne journalière ne doit pas être dépassée plus de 35 fois par année civile.
[12] Code de l’environnement, article R. 221-1, I, 7°.
[13] Code de l’environnement, article R. 221-1, I, 6°.
[14] Directive du Conseil et du Parlement européen 2008/50/CE du 21 mai 2008 concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe, art. 16 (Journal officiel de l’Union européenne n° L 152 du 11 juin 2008, p. 1).
[15] Code de l’environnement, article R. 221-1, I, 5°.
[16] Arrêté du 7 avril 2016 relatif au déclenchement des procédures préfectorales en cas d’épisodes de pollution de l’air ambiant (Journal officiel du 9 avril 2016, texte n° 5), modifié par arrêté du 26 août 2016 (Journal officiel du 27 août 2016, texte n° 1).
[17] Voir : Les bons gestes sur le site du Ministère de la transition écologique et solidaire : http://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Panneau%20les%20épisodes%20de%20pollution.pdf.
[18] CE 28 février 2000, M. Petit-Perrin, req. n° 189082.
[19] Arrêté du 21 juin 2016 établissant la nomenclature des véhicules classés en fonction de leur niveau d’émission de polluants atmosphériques en application de l’article R. 318-2 du code de la route (Journal officiel du 23 juin 2016, texte n° 12).
[20] Code de l’environnement, articles L. 222-4 et R. 222-20-1.
[21] Code de l’environnement, article L. 222-6.
[22] Code général des collectivités territoriales, article L. 2213-4-1.
[23] https://www.prefecturedepolice.interieur.gouv.fr/Nous-connaitre/Actualites/Prevention/Circuler-a-Paris-et-dans-l-agglomeration-a-compter-du-16-janvier-2017.
[24] Code de la route, article R. 411-19-1.
[25] Code de l’environnement, article L. 221-1 et arrêté du 19 avril 2017 relatif au dispositif national de surveillance de la qualité de l’air ambiant (Journal officiel du 22 avril 2017).
[26] Le consortium PREV’AIR est composé de l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS), de Météo-France, du Laboratoire central de surveillance de la qualité de l’air (LCSQA) et du CNRS.
L’Encyclopédie de l’environnement est publiée par l’Association des Encyclopédies de l’Environnement et de l’Énergie (www.a3e.fr), contractuellement liée à l’université Grenoble Alpes et à Grenoble INP, et parrainée par l’Académie des sciences.
Pour citer cet article : MOLINER-DUBOST Marianne (19 septembre 2018), Comment le droit protège-t-il la qualité de l’air ?, Encyclopédie de l’Environnement. Consulté le 21 décembre 2024 [en ligne ISSN 2555-0950] url : https://www.encyclopedie-environnement.org/societe/comment-le-droit-protege-t-il-la-qualite-de-lair/.
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