| Focus 1/1 | Poussée d’Archimède et portance

Le décrochage des avions de ligne maîtrisé

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Encyclopedie environnement - décrochage avion - décollement de la couche limite sur l’extrados d’une aile
Figure 1. Visualisation en soufflerie du décollement de la couche limite sur l’extrados d’une aile dont l’incidence dépasse un certain seuil.[Source : Par Jaganath at English Wikipedia [GFDL (http://www.gnu.org/copyleft/fdl.html) or CC-BY-SA-3.0 (http://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/)], via Wikimedia Commons]
La plupart des catastrophes aériennes qui sont restées dans les mémoires, comme celle du vol 447 d’Air France allant de Rio à Paris en juin 2009, impliquent un décrochage. Cette expression désigne une perte d’altitude consécutive à une diminution de la portance, laquelle est engendrée par le décollement de la couche limite présente le long de l’extrados de l’aile, comme celui mis en évidence sur la figure 1. L’avion, dont le poids n’a pas diminué, s’engage alors dans une chute qui ne peut s’arrêter que si le pilote ou le système de pilotage automatique permet de corriger cette perte de portance.

Voyons d’abord de quoi il s’agit. Puisque la portance est la résultante des forces de pression sur le contour de l’aile, pour qu’elle soit positive, il est nécessaire que la vitesse de l’air sur l’extrados (au-dessus de l’aile) soit plus grande – la pression plus faible – que celle sur l’intrados (au-dessous de l’aile). Or c’est le contraire qui se produit en cas de décollement bien marqué, puisqu’alors le tourbillon nettement visible sur la figure 1 ramène de l’air au voisinage immédiat de la paroi et réduit donc la vitesse relative entre l’aile et le fluide environnant. Ce phénomène, qui n’est pas violent mais progressif, est lié à la fois à un ralentissement de l’avion, ce qui suffit déjà à expliquer une réduction de la portance, et à un accroissement trop rapide de l’incidence, souvent commandé par le pilote pour compenser la diminution de la vitesse. La valeur critique de l’incidence qui conduit au décrochage dépend de la vitesse et de la forme de l’aile. En général, elle se situe entre 5° et 20° ; elle est proche de 16 ° dans le cas particulier de la figure 2. Par ailleurs, puisque ce décrochage est lié au décollement de la couche limite, dès qu’il apparaît, les tourbillons présents dans la région décollée de la paroi engendrent d’assez fortes fluctuations de pression qui secouent l’avion et avertissent ainsi le pilote.

Encyclopedie environnement - décrochage avion - variation de la portance d’une aile en fonction de son incidence
Figure 2. Exemple de variation de la portance d’une aile en fonction de son incidence (ou angle d’attaque). La portance de l’aile testée varie presque linéairement entre -5° et +10°, puis atteint un maximum vers 16° avant de diminuer.

Alors, comment réagir ? Avant 2009, la procédure à laquelle tous les pilotes étaient formés consistait à augmenter la puissance des moteurs pour reprendre de la vitesse, tout en diminuant l’incidence et en laissant l’avion effectuer une certaine descente. Pour suivre cette procédure, le pilote devait disposer d’informations justes sur les paramètres du vol. Dans le cas du vol Rio-Paris, les boîtes noires ont révélé que les pilotes avaient été trompés par les appareils. Les sondes de Pitot extérieures utilisées comme capteurs de vitesse avaient en effet gelé et indiquaient une survitesse poussant les pilotes à freiner au lieu d’accélérer ; l’ordinateur de bord donnait aussi l’ordre de cabrer l’avion au lieu de réduire son incidence.

Depuis ce malheureux accident les constructeurs ont fait évoluer les systèmes d’information des pilotes, redonnant à ceux-ci la possibilité de prendre la main sur l’ordinateur de bord en cas d’informations incohérentes issues des divers capteurs. A titre d’exemple, les avions Airbus sont désormais équipés de deux systèmes distincts : celui qui donne la vitesse de l’avion à partir des données fournies par les capteurs habituels – encore les sondes de Pitot – et un autre qui la déduit des sondes d’incidence. Les pilotes et les compagnies aériennes s’accordent à considérer que le risque de décrochage est maîtrisé.